vendredi 30 juin 2017

Hommage à Patrice Lumumba 30 juin 1960 - 30 juin 2017

En hommage à un grand combattant de la cause je reproduis ici le texte du discours de Patrice Emery Lumumba, lâchement assassiné. Comme Moïse, Martin Luther King, et bien d'autres, il a entrevu la terre promise, mais les forces diaboliques ne lui ont pas permis de fouler le sol.

En lisant ce texte du discours de Patrice Lumumba à l'occasion de l'indépendance du Congo le 30 juin 1960, je ne peux que constater que, au regard de ce qu'il dénonce comme traitements subis par les colonisés avant les indépendances, ceux-ci se poursuivent à ce jour et son martyr pour la libération du peuple congolais a été vain. Ce peuple continue à se déchirer pendant que les perfides s'enrichissent sur les champs des millions de morts. Cette situation est la même dans les colonies françaises et belges d'Afrique. Seules les colonies anglo-saxonnes ont réellement réussi à s'émanciper. Mais à y regarder de près, sa lutte et son combat pour la libération de l'Afrique, de son sang de martyr, des générations de femmes et des hommes poursuivent son combat.
Bonne lecture.

«Congolaise et Congolais,
Combattants de l’indépendance aujourd’hui victorieux,
Je vous salue au nom du gouvernement congolais.
A vous tous, mes amis, qui avez lutté sans relâche à nos
côtés, je vous demande de faire de ce 30 juin 1960 une date
illustre que vous garderez.
A vous tous, mes amis qui avez lutté sans relâche à nos côtés,
je vous demande de faire de ce 30 juin 1960 une date illustre
que vous garderez ineffaçablement gravée dans vos cœurs,
une date dont vous enseignerez avec fierté la signification à
vos enfants, pour que ceux-ci à leur tour fassent connaître à
leurs fils et à leurs petits-fils l’histoire glorieuse de notre lutte
pour la liberté.
Car cette indépendance du Congo, si elle est proclamée
aujourd’hui dans l’entente avec la Belgique, pays ami avec qui
nous traitons d’égal à égal. Nul Congolais digne de ce nom ne
pourra jamais oublier cependant que c’est par la lutte qu’elle a
été conquise, une lutte de tous les jours, une lutte ardente et
idéaliste, une lutte dans laquelle nous n’avons ménagé ni nos
forces, ni nos privations, ni nos souffrances, ni notre sang.
C’est une lutte qui fut de larmes, de feu et de sang, nous en
sommes fiers jusqu’au plus profond de nous-mêmes, car ce
fut une lutte noble et juste, une lutte indispensable pour mettre
fin à l’humiliant esclavage, qui nous était imposé par la force.
Ce que fut notre sort en 80 ans de régime colonialiste, nos
blessures sont trop fraîches et trop douloureuses encore pour
que nous puissions les chasser de notre mémoire.
Nous avons connu le travail harassant exigé en échange de
salaires qui ne nous permettaient ni de manger à notre faim, ni
de nous vêtir ou de nous loger décemment, ni d’élever nos
enfants comme des êtres chers.
Nous avons connu les ironies, les insultes, les coups que nous
devions subir matin, midi et soir, parce que nous étions des
nègres. Qui oubliera qu’à un noir on disait « Tu », non certes
comme à un ami, mais parce que le « Vous » honorable était
réservé aux seuls blancs !
Nous avons connu nos terres spoliées au nom de textes
prétendument légaux, qui ne faisaient que reconnaître le droit
du plus fort.
Nous avons connu que la loi n’était jamais la même, selon
qu’il s’agissait d’un blanc ou d’un noir, accommodante pour
les uns, cruelle et inhumaine pour les autres.
Nous avons connu les souffrances atroces des relégués pour
opinions politiques ou, croyances religieuses : exilés dans leur
propre patrie, leur sort était vraiment pire que la mort elle-
même. Nous avons connu qu’il y avait dans les villes des
maisons magnifiques pour les blancs et des paillotes
croulantes pour les noirs ; qu’un Noir n’était admis ni dans les
cinémas, ni dans les restaurants, ni dans les magasins dits
« européens » ; qu’un Noir voyageait à même la coque des
péniches au pied du blanc dans sa cabine de luxe.
Qui oubliera, enfin, les fusillades où périrent tant de nos frères,
ou les cachots où furent brutalement jetés ceux qui ne
voulaient plus se soumettre au régime d’une justice
d’oppression et d’exploitation !…
Ensemble mes frères, mes sœurs, nous allons commencer une
nouvelle lutte, une lutte sublime qui va mener notre pays à la
paix, à la prospérité et à la grandeur.
Nous allons établir ensemble la justice sociale et assurer que
chacun reçoive la juste rémunération de son travail.
Nous allons montrer au monde ce que peut faire l’homme noir
lorsqu’il travaille dans la liberté, et nous allons faire du Congo
le centre de rayonnement de l’Afrique toute entière.
Nous allons veiller à ce que les terres de notre patrie profitent
véritablement à ses enfants. Nous allons revoir toutes les lois
d’autrefois et en faire de nouvelles qui seront justes et nobles.
Et pour tout cela, chers compatriotes, soyez sûrs que nous
pourrons compter non seulement sur nos forces énormes et
nos richesses immenses, mais sur l’assistance de nombreux
pays étrangers dont nous accepterons la collaboration chaque
fois qu’elle sera loyale et qu’elle ne cherchera pas à nous
imposer une politique quelle qu’elle soit.
Ainsi, le Congo nouveau que mon gouvernement va créer sera
un pays riche, libre et prospère. Je vous demande à tous
d’oublier les querelles tribales qui nous épuisent et risquent de
nous faire mépriser à l’étranger.
Je vous demande à tous de ne reculer devant aucun sacrifice
pour assurer la réussite de notre grandiose entreprise.
l’indépendance du Congo marque un pas décisif vers la
libération de tout le continent africain. Notre gouvernement
fort -national- populaire, sera le salut de ce pays.
J’invite tous les citoyens congolais, hommes, femmes et
enfants de se mettre résolument au travail, en vue de créer
une économie nationale prospère qui consacrera notre
indépendance économique.
Hommage aux combattants de la liberté nationale !
Vive l’indépendance et l’unité africaine !
Vive le Congo indépendant et souverain !»

Patrice Emery Lumumba

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