mercredi 21 janvier 2015

La France comme un modèle pour les droits humains et la liberté d'expression? Vous plaisantez

Ce Blog publie ici un article du journal israélien Haaretz paru le 14 janvier 2015 dont l'auteur, Tomer Barak, est médecin israélien en service dans un hôpital public au Botswana, est professeur de médecine à la Harvard Medical School, Bonne lecture.



S’il y a vraiment une guerre de cultures, elle n’oppose pas l’Islam meurtrière contre la démocratie libérale, mais l'Islam meurtrière contre le capitalisme
cupide, qui est tout aussi meurtrier.

Les événements de la semaine dernière à Paris étaient tristes, douloureux et choquant. Pourtant, quelque chose sans la rhétorique que les dirigeants de la France ont choisi d'utiliser pendant ces événements me causèrent un sentiment de malaise qui s’est transformé au cours du week-end en une nausée totale.

Même si nous supposons que les appels à "Liberté, Égalité, Fraternité» avec lesquels la France fit irruption dans l'ère moderne furent pris au sérieux par les instigateurs bourgeois de la Révolution française, il n'y a aucun doute qu'ils n’ont pas causé auprès du peuple français des nuits blanches depuis les assourdissants bruits de guillotines à la fin du 18ème siècle.
Toute personne ne serait-ce que légèrement familière de l'histoire des pays hors la France, aura du mal à comprendre comment la complaisante, machiavélique, oppressive France, ose se présenter pratiquement comme le dernier bastion des droits de l'homme et de la liberté d'expression. Il n'y a pas assez d'espace ici pour détailler les abus de la France dans toutes ses anciennes colonies. Quiconque est intéressé peut faire un peu de recherche sur Google concernant: le Mali, la Côte-d'Ivoire, le Cameroun, la République Centrafricaine, le Gabon, pour n’en nommer que quelques-uns.


L'histoire se répète, de manière si routinière que c’en est presque ennuyeux. C’est appelé "Françafrique": une relation de prédation entre l'Élysée et des pays qui possèdent une richesse inégalée sous la forme de ressources naturelles - des ressources qui ont transformé la France en un pays moderne et prospère tout en laissant des millions d'Africains souffrir d’une inimaginable pauvreté et d’horribles maladies, et abandonner des millions d'autres aux mains des violeurs, des tortionnaires, des mutilateurs et des assassins, qui souvent travaillent pour les régimes fantoches mis en place par les "anciens" maîtres coloniaux. Ceci est du terrorisme dans tous les sens du terme, du terrorisme dans la vie de tous les jours qui ne fait presque jamais la une des journaux ou n’apparait sur les écrans de télévision, ce terrorisme a un pays - et ce pays est la France.

Prenons, par exemple, le Gabon, un pays africain sur la côte riche en pétrole de l'océan Atlantique. Gabon obtint son indépendance nominale en 1960, pendant la même période la France a perdu son emprise sur l'Algérie, qui avait été sa principale source de pétrole brut jusque-là. La France, dont le moteurs économique devait continuer à fonctionner avec ou sans l'Algérie, rapidement fit en sorte que son fils chéri Léon Mba remporte la première élection du Gabon, qui n’était ni libre ni démocratique.
Aussitôt que Mba gagna, il suivit les conseils de ses conseillers français et fit fermer les journaux, arrêter les leaders de l'opposition et interdit les partis politiques à l'exception, bien sûr, du sien. Dans le même temps, il fit un pacte avec l'Élysée consistant à écrémer des sommes «modestes» comme signe de gratitude pour l'aide fournie à ses employeurs français dans le «développement» continue des ressources naturelles de son pays.
Son successeur, Omar Bongo Ondimba, est allé encore plus loin, tissant des amitiés profondes avec tous les présidents de la France, de de Gaulle à Chirac, grâce à ce partenariat il devint l'une des personnes les plus riches du monde, pendant que les flux de pétrole brut allaient sans entrave vers la France et les habitants du Gabon continuaient à étouffer sous la pauvreté et mourir de malnutrition et de maladie. Lorsque les gens osaient sortir dans les rues pour protester, ils étaient repoussés dans leurs misérables demeures par les troupes de l'armée française stationnée à la base militaire du Camp de Gaulle à la périphérie de la capitale.
Aujourd'hui, le fils d'Omar Bongo Ondimba, Ali Bongo Ondimba et son gang (comme leurs amis dans la plupart des pays africains de langue française) continuent d'opprimer leur propre peuple, alors que leurs relations avec la France, les Etats-Unis et d'autres pays du monde moderne deviennent plus étroites.

Malgré le troisième PNB par habitant en Afrique subsaharienne, le million et demi de citoyens Gabonais, qui est dispersé sur un territoire à peu près de la taille de la Grande-Bretagne, vivent dans une terrible pauvreté et occupent la 112ème place sur l'indice de développement humain. La France, qui a seulement environ deux fois cette taille, a une population 45 fois plus grande et a beaucoup moins de ressources naturelles, est à la 20ème place. Comme la plupart des 20 premiers pays de cet l'indice, la France n’aime pas parler de comment elle est arrivée à cette place. Elle deteste tellement d’en parler, qu'elle l’oublie tout simplement.
Les pays de l'Occident, qui, il y a seulement deux décennies, avaient adoptées avec enthousiasme la théorie de Francis Fukuyama à propos de "La Fin de l'Histoire et le dernier homme» et qui étaient convaincus que les opprimés du monde étaient sur le point de brandir la cocarde tricolore en marchant vers les bureaux de vote, sont une fois de plus choqués par la vague de terrorisme islamique. Comment ces primitifs n’arrivent-ils pas à comprendre la simplicité et le bonheur qu’il y a à vivre dans la liberté, l'égalité et la fraternité et que la démocratie soit beaucoup plus agréable, avec MTV et le piercing du nombril, que ne sont le Coran et la burqa?
Si c’est vraiment une guerre de cultures, elle n’oppose pas l’Islam meurtrier et la démocratie libérale, mais l'Islam meurtrier et le capitalisme avide, qui est tout aussi meurtrier, et hypocrite, avec une histoire qui est beaucoup plus longue et sanglante que celle d'Al-Qaida et de l'Etat islamique.
Toute personne offensée par les caricatures est idiote, et quiconque commet un assassinat pour cela est un abject spécimen dont la place est dans un enfer. Mais la prochaine fois que je devrais écouter François Hollande se précipiter pour la défense de la démocratie et de la liberté d'expression, je vais m’assurer d'avoir des sachets pour recueillir mes vomissures sous la main.

Dr Tomer Barak

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