mercredi 4 février 2015

Propos liminaire de la Conférence de Presse du Front Unie pour l'Alternance 04/02/2015


FRONT DE L’OPPOSITION POUR L’ALTERNANCE

Conférence de presse


Libreville le 04 Février 2015

 Mesdames, messieurs,

En lisant le quotidien l’Union ce matin, nous apprenons que Monsieur Ali Bongo Ondimba présidera cet après-midi une rencontre avec les Partis politiques de la majorité et de l’opposition.

Au-delà des usages républicains, qui veulent qu’une invitation soit adressée aux responsables des Partis politiques, il nous est demandé d’aller traiter des questions qui concernent au plus haut point notre pays, sans ordre du jour, et donc, sans préparation aucune.

Le Gabon, ce n’est un secret pour personne, traverse l’une des plus graves crises de son histoire.

Cette crise est d’abord politique, parce que créée par le coup d’état électoral de septembre 2009.

Cette crise est institutionnelle, parce qu’il est désormais prouvé que la première institution du pays, à savoir le Président de la République, a fabriqué de faux documents pour constituer son dossier de candidature pour se présenter à l’élection présidentielle de 2009.

Cette crise est sociale, parce que le pays est traversé par des mouvements de grève dans tous les secteurs d’activités.

Cette crise est économique, parce que les choix du Pouvoir en place mènent le pays dans une impasse.

Cette crise est éthique, parce que le Gabon a cessé de croire en ses dirigeants, qui multiplient des promesses et ne les tiennent jamais.

Il y a quelques jours, et de la manière la plus solennelle, Monsieur Ali Bongo Ondimba a fait la promesse dans son adresse à la Nation, d’améliorer de manière substantielle dès fin janvier 2015, les revenus des gabonais, le tout, sans avoir à attendre les résultats du dialogue social pourtant engagé par lui-même.

A l’échéance annoncée, il a plutôt envoyé les forces de sécurité et de défense, avec pour mission d’empêcher la tenue par les partenaires sociaux d’une assemblée générale, dont l’objet était de faire le point sur cette promesse non tenue.

A l’heure où la communauté internationale invite la classe politique gabonaise à un dialogue franc et sincère, Ali Bongo Ondimba, selon une tradition bien assise, veut se présenter comme un démocrate ouvert au dialogue, alors que les membres du FRONT sont interdits de sortie du territoire, convoqués quotidiennement à la Police judiciaire ou au Parquet, et que Jean Ping fait l’objet à ce jour d’un acharnement judiciaire.

Au moment où Ali Bongo Ondimba s’apprête à sortir du territoire pour un voyage en Europe, où il ne manquera pas d’agiter le drapeau de la démocratie, le FRONT refuse d’être la caution de cette mascarade.

Pour toutes ces raisons, il ne prendra donc pas à ce dialogue de dupes.

En revanche, nous entendons particulièrement consacrer l’essentiel de notre échange de ce jour autour de la thématique relative à l’auto saisine du Parquet, ou plutôt à la saisine d’office, qui est à l’origine des derniers remous que nous constatons ces derniers jours.

Nous avons choisi d’échanger sur le concept de l’auto saisine du Parquet, parce que c’est à la faveur de sa mise en œuvre qu’un des nôtres, en l’occurrence Monsieur Jean Ping, fait l’objet des attentions particulières du Parquet et de la Police judiciaire.

Après un bref rappel des faits, nous allons revisiter ce concept, et observer ensemble que cette faculté reconnue par la loi aux juges, ne se préoccupe pas des véritables interrogations que soulève cette procédure.

I.       Sur les faits

Le 12 janvier vers 8h30, plus de 300 jeunes avaient été recrutés pour prendre part à un prétendu meeting du Parti Démocratique Gabonais (PDG), et contre une promesse de cinq milles (5.000) francs, ils avaient été transportés au quartier des Charbonnages.

 

Sous le regard d’une escouade de gendarmes en faction, ces jeunes ont attaqué par vagues successives le domicile de Monsieur Jean Ping, dévoilant clairement l’objet de leur recrutement.

Au regard du mutisme des forces de sécurité, Jean Ping a avisé Madame le Procureur de la République en personne, appelé au secours des militants, et par précaution face à ce contexte pour le moins intrigant, rapidement commis la diligence d’un huissier pour s’aménager des preuves.

Sous ce dernier détail, Jean Ping ne savait pas si bien faire, parce que le principe de précaution qu’il a choisi d’observer va lui donner raison, face à ce qui prend toutes les allures d’une parodie de justice.

Accourus à la détresse de Jean Ping, les militants du Front et des gabonais de bonne foi ont opposé la force citoyenne à la force destructrice, et au terme de cet exercice, ils ont réussi à appréhender plusieurs agresseurs, dont une partie a été curieusement libérée par les gendarmes en faction.

Dans cette confusion, dix sept (17) agresseurs ont été neutralisés, ramenés à la résidence de Jean Ping, et pour laisser trace, certains d’entre eux ont été interrogés par l’huissier et par la presse, le tout, en présence d’un officier de Police judiciaire arrivé tôt sur les lieux.

Parmi les 17 jeunes ayant été appréhendés et remis à la Police judiciaire, deux d’entres eux nommeront un certain Monsieur Opiangah comme le commanditaire de cet acte.

Contre toute attente, ces deux jeunes ayant effectué des dénonciations circonstanciées manquent à l’appel pour les besoins de la procédure.

 II.      Sur la saisine d’office et les grandes interrogations de la procédure

2.1.   La pertinence de la saisine d’office

Toute infraction doit être dénoncée au Procureur et donner lieu à des poursuites.

 

Lorsque l’examen des procès verbaux d’enquête préliminaire dévoile des faits constitutifs d’une infraction à la loi pénale, non initialement portés à l’attention du Parquet, ce dernier peut d’office, sur sa propre initiative, décider de poursuivre, le tout, indépendamment de toute plainte préalable ou en l’absence de toute dénonciation.

C’est la saisine d’office.

L’image mettant en scène une personne ligotée est, a priori, est un acte de maltraitance, qui appelle qu’une clarification.

De ce point de vue, la saisine d’office du Parquet se justifie amplement, sans préjuger des suites de droit qui en découleront.

 

2.2.   Le silence du Parquet

Investi par la loi de cette faculté lui permettant, en toute impartialité, de tirer toutes les conséquences de droit attachés à la vérité des faits, le silence du Parquet suscite des interrogations devant :

·        La lumière à faire autour de ce meeting supposé du PDG, ayant mobilisé les Forces de Sécurité sur le théâtre des opérations, et dont le dessein réel révélé sur les lieux n’a donné lieu à aucune enquête à ce jour.

Dopés par autant d’égard, ceux des activistes appréhendés ont opposé une farouche résistance.

Leurs nombreux comparses courent toujours, et en si bon chemin, préparent certainement leur prochaine sortie.

Les commanditaires, réels et supposés, font la leçon au Peuple.

·        Le mutisme des gendarmes devant les infractions qui ont été commises en leur présence par des bandes organisées.

·        L’intervention curieuse de ces mêmes gendarmes au profit des agresseurs arrêtés, qu’ils se sont empressés de libérer, non pas pour les présenter devant le Parquet, mais pour les soustraire des poursuites pénales qui devaient suivre.

·        La non présentation au Parquet de toutes les personnes arrêtées, et tout particulièrement des deux ayant clairement dévoilés le nom de leur commanditaire, alors que, remis à la Police judiciaire, ils ont été, sinon placés sous main de justice, en tout mis sous contrôle du Parquet, avec charge et garantie de représentation pour tous les besoins de la procédure et la manifestation de la vérité.

Il est surprenant de constater, que cet état de fiat, constitutif de l’infraction de recel de malfaiteurs, n’ait donné lieu à l’ouverture d’une enquête à ce jour.

S’agissant de ceux qui ont été présentés au Parquet, nous constatons qu’ils sont sortis de la garde à vue avec une version surréaliste, qui présente désormais Jean Ping comme débiteur à leur égard d’une créance de cinq mille (5.000) francs, qu’ils seraient partis réclamer, comme si dans l’invraisemblance d’une telle version, la violence physique protégée par les Forces de Sécurité était devenue un moyen de recouvrement des créances.

Cette situation grave signalée contre la manifestation de la vérité au sortir de l’enquête préliminaire, qui est constitutive d’une infraction, qualifiée « subornation de témoins », n’a pas donnée lieu à l’ouverture d’une enquête.

 

III.     Sur l’égalité des citoyens devant la loi

Mesdames, messieurs,

La conclusion sur laquelle s’ouvrent toutes ces observations pose un questionnement grave.

Se fondant sur les dispositions pertinentes de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme et du citoyen, qui rappelle que la force publique est instituée pour l’intérêt de tous et non pour les convenances de ceux qui en ont la gestion, le FRONT prend l’opinion nationale et internationale à témoin devant ce précédent grave, qui montre l’instrumentalisation de la force publique au service du Pouvoir.

Dans l’Etat de droit, les citoyens, tous les citoyens sont égaux devant la loi, selon qu’elle réprime ou qu’elle protège.

 Dans l’état de droit, les Forces de sécurité ont, entre autres missions, de constater les infractions à la loi pénale, de rassembler les preuves, de rechercher les auteurs et leurs commanditaires, et de les déférer devant les juridictions compétentes, à charge par elles de dire le droit, tout le droit attaché à ces faits.

 Dans la réalité, l’Etat de droit qui a cours au Gabon nous donne à constater un précédent d’une particulière gravité.

Nous constatons, que le 12 janvier 2015 Jean Ping a fait l’objet d’une agression parfaitement planifiée.

 Nous constatons que le 12 janvier 2015, les auteurs de cette agression planifiée ont notoirement bénéficié, de la protection des forces de sécurité, qui ont délibérément choisies de ne pas constater les infractions commises en leur présence constante, et de ne pas arrêter leurs auteurs.

Nous constatons que le 12 janvier 2015, les commanditaires de cette agression, parfaitement identifiés par leurs bras séculiers ne font l’objet d’aucune recherche de la part  des forces de sécurité, alors que leur mission leur commande de le faire.

Nous constatons, que pour avoir mis en échec cette agression, Jean Ping fait l’objet de procédures judiciaires, auxquelles il coopère de bonne foi, sans opposer la moindre entrave.

En même temps, nous constatons qu’Ali Bongo Ondimba est, autant que Jean Ping, un citoyen soumis à la loi.

Nous constatons que ce dernier fait l’objet de nombreuses procédures, contre lesquelles il oppose une entrave notoirement organisée.

 Devant l’oppression organisée, au nom de la loi, contre Ping, et l’impunité organisée au nom de la même loi au bénéfice d’Ali Bongo Ondimba, nous notons, ici et maintenant la rupture du Pacte républicain à l’initiative des autorités compétentes.

Alors que la loi qui s’impose à tous et doit faire autorité à l’égard de tous, n’est appliquée qu’à certains, notamment aux dirigeants du FRONT, à ses membres, ainsi qu’à l’encontre des nombreux gabonais dépourvus de toute protection,  nous émettons la plus grande crainte, qu’à partir de ce jour, la loi ne cesse d’obliger tous les citoyens, au nom du principe républicain d’égalité.

 Je vous remercie.

 

MOUKAGNI-IWANGOU

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