L’effroyable imposture impériale en Afrique
le 23 janvier, 2014 dans Conflit malien par Nico Ramirez« Les jihadistes n’auraient pas fait régner la terreur dans le nord du Mali si Nicolas Sarkozy et un certain Bernard-Henri Lévy n’avaient mis la Libye à feu et à sang, en faisant fi des tragiques conséquences ». C’est l’intellectuelle malienne Aminata Traoré, également ancienne ministre de la Culture et du Tourisme du Mali, qui s’exprime ainsi, dans un livre qu’elle cosigne avec l’écrivain sénégalais Boubacar Boris Diop, très judicieusement intitulé « La gloire des imposteurs » (éditions Philippe Rey).
Le livre place en pleine lumière la reprise en main par l’Empire de l’Afrique subsaharienne au travers de l’opération Serval, une agression militaire remaquillée en conte de fées pour traquer le barbu, à coup de chat-bite entre forces spéciales et idiots utiles. « Le compatriote de Talleyrand a sûrement éprouvé le même sentiment de fierté pour son aisance à faire passer la 49è intervention militaire française en Afrique pour un acte de pur altruisme », écrit Boubacar Boris Diop au sujet de François Hollande.
Avant de porter le coup fatal qui donne son titre à l’ouvrage : « Serval, c’est l’imposture dans toute sa splendeur, l’imposture dans toute sa gloire : le succès a dépassé les plus folles espérances des stratèges ».
Les auteurs ne se limitent pas seulement à une critique de l’Etat français pour s’interroger sur les responsabilités du naufrage du Mali et de la sous-région. Ils s’insurgent, assez logiquement, contre le dogme néo-libéral qu’impose le FMI : « Chacun est sommé de comprendre qu’il n’y a pas d’alternative à ce modèle économique : on doit changer les gouvernants, on doit aller aux élections, mais il n’est pas question de toucher aux réformes néolibérales pourtant sources de douleur et de colère ».
Mais ils ciblent aussi « l’homme politique africain souvent moins soucieux de convaincre ses compatriotes que de donner des gages de docilité à de lointains parrains étrangers », soulignant en cela l’aberration de dirigeants imposés pour mettre en action des décisions prises hors de l’Afrique.
« La Françafrique est un serpent à deux têtes : l’une à Paris, l’autre dans chacune des capitales concernée. Comme le serpent, elle change de peau, mais fondamentalement les méthodes, le rapport de domination à travers des élites cooptées sont là ! », martèlent Aminata Traoré et Boubacar Boris Diop.
Les livres d’Histoire officiels retiendront que l’intervention de la France au Mali fut couronnée de succès. « La gloire des imposteurs », quelle que soit la couleur de leur peau…